Plus d'un an après le viol d'une petite fille en Côte-d'Or, la piste familiale reste inexplorée. Me Marie Grimaud, partie civile, réclame d'urgence d'autres investigations.
Une petite fille violée, des éléments qui ouvrent sur une piste intra-familiale et une instruction qui reste pourtant toujours au point mort depuis des mois, selon une avocate de la partie civile... Comment expliquer l'immobilisme de la justice dans l'affaire de Genlis (Côte-d'Or), un viol sur une enfant d'à peine 4 ans, pour lequel un instituteur avait été mis en examen, avant de passer au statut de témoin assisté et dont L'Express a raconté l'histoire en détail?
Faute d'avoir la réponse, maître Marie Grimaud, partie civile pour l'association Innocence en danger, vient de déposer une demande d'actes complémentaires auprès de la juridiction de Dijon, dans l'espoir de relancer l'enquête. Et d'assurer la protection de l'enfant.
Un retournement de situation
L'affaire a débuté il y a maintenant près d'un an et demi, en novembre 2016. Eric P., professeur des écoles remplaçant, est mis en examen pour le viol d'une élève de maternelle, dont la rupture partielle de l'hymen a été constatée par un expert médico-légal. Quand on l'interroge, l'enfant répond que "le maître" lui "a gratté le kiki".Quatre mois plus tard, retournement de situation: l'analyse de la culotte de la petite fille révèle des traces de sperme porteuses de l'ADN d'un parent proche, de sexe masculin. Eric P. a obtenu le statut de témoin assisté le 16 novembre dernier. Depuis, le magistrat chargé de l'instruction n'a ordonné aucune investigation supplémentaire ni mené de nouvelles auditions, selon Me Grimaud.
Le parquet n'a pas non plus donné suite à la demande de l'avocate de nommer un administrateur ad hoc et un avocat spécifique pour la victime, comme le voudrait l'usage dans ce genre de cas. "Nous avons là un vrai problème de fonctionnement de la justice", s'insurge Me Grimaud, qui réitère aujourd'hui sa demande, et réclame également que la petite fille et ses parents, avec lesquels elle vit, soient réentendus en sa présence. Elle souhaite par ailleurs que la grande soeur de la victime soit, elle aussi, expertisée.
Des érythèmes au niveau des parties génitales
Outre les traces de sperme retrouvées dans la culotte, Me Grimaud fait valoir un autre élément important, "qui devrait susciter à lui seul des mesures de protection de la petite", explique-t-elle : en juin 2017, soit environ sept mois après le déclenchement de l'affaire, la fillette a de nouveau été examinée par deux médecins légistes.L'expertise a révélé des hématomes et des griffures sur tout le corps, ainsi que des érythèmes au niveau des parties génitales. "Les spécialistes à qui j'ai montré ces résultats ont tous la certitude que la petite est victime de maltraitance physique et sexuelle, ce qui nous ramène, une nouvelle fois, à la piste intra-familiale", commente l'avocate. Elle sait de quoi elle parle, elle était partie civile au procès Fiona. Tous ces éléments sont dans le bureau du juge, qui ne bouge pas. "Est-ce parce que la mère est gendarme et que la gendarmerie est la première à mener les enquêtes dans ce type de juridiction rurales ?" interroge-t-elle.
Si le juge reste sourd à ses requêtes, Me Grimaud se dit prête à saisir le président de la chambre de l'instruction afin qu'il se réserve le dossier. En clair, qu'il reprenne les rênes. De son côté, Eric P., qui a effectué quatre mois en détention préventive, organise à l'initiative de son avocat, Claude Llorente, une conférence de presse ce mercredi à Morey-Saint-Denis (Côte d'Or) pour alerter sur l'état de l'enquête. Il a préparé un courrier destiné au ministère de la Justice ainsi qu'au Défenseur des droits de l'enfant, assorti, explique-t-il, d'une reconstitution de "la preuve ADN dont la justice dispose depuis près d'un an".
L'enquête sur le viol d'une fillette de 4 ans dans une école de Genlis (Côte-d'Or), en novembre 2016, n'avance pas.
afp.com/FRED DUFOUR