Le présent dossier traite des fausses accusations d’abus sexuel : il ne met aucunement en cause l’existence d’abus réels, et la nécessité d’en confondre les auteurs. Les fausses accusations ne peuvent d’ailleurs trouver une crédibilité et prospérer que dans la mesure où existent ces abus réels : en 1996, c’est l’affaire du pédophile belge Dutroux qui a déclenché une vague de fausses accusations dans les pays d’Europe occidentale.
Tous les mis en cause dont les noms sont cités ont été blanchis par la Justice ou par leurs accusatrices.
1. Les fausses accusations sont vieilles comme le monde
De tous temps, des individus malveillants en ont faussement accusé d’autres de méfaits divers, pour régler leurs comptes sans risque : ce genre d’acte est individuel et indépendant du contexte social.
Mais l’histoire connaît aussi, ponctuellement, des phénomènes de fausses accusations de masse. Elles atteignent ce niveau de masse parce que situées dans un contexte idéologique/politique qui les suscite et les favorise. Ce contexte instaure un rapport de forces totalement favorable aux accusateurs, qui ne risquent rien, et totalement défavorable aux mis en cause, qui ne peuvent se défendre. Ainsi, la France occupée des années 40 a vu proliférer les accusations de marché noir ou de résistance. Ensuite la France libérée de 1945 a vu proliférer les accusations de collaboration.
On trouve dans l’histoire au moins un phénomène de fausses accusations de masse sexué, c’est-à-dire dirigé contre des personnes du même sexe : celui dit de la « chasse aux sorcières », qui a sévi dans toute l’Europe, du XVe au XVIIe siècle. C’est un phénomène de masse, avec cent mille procès conduisant à cinquante mille exécutions. C’est un phénomène sexué : les cibles sont des femmes, dans une proportion de 80%. Et donc un phénomène sexiste : Le marteau des sorcières, écrit par deux théologiens fanatiques, qui prétend dresser le portrait-robot des personnes présumées dangereuses, les désigne explicitement et exclusivement comme des femmes. Enfin c’est un phénomène irrationnel, une hystérie collective : on accuse par mimétisme, on juge suite à une simple dénonciation, on condamne sans preuves, à partir d’aveux extorqués, et sans même croire au chef d’accusation qui devient un simple prétexte.
2. Notre société a permis et encouragé le développement d’un nouveau phénomène, massif et sexué : les fausses accusations d’abus sexuel dirigées contre des hommes
Le phénomène des fausses accusations d’abus sexuel (attouchements, viols), dirigées contre des hommes, est très comparable à celui de la « chasse » :
a) c’est un phénomène de masse. Le chiffrage en est malheureusement peu élaboré, entre autres parce que la Justice et les institutions en général ne souhaitent pas y procéder, tant il dévoilerait leur complicité et leur incurie :
- pour l’Éducation nationale : la Fédération des Autonomes de solidarité, mutuelle enseignante spécialisée dans les risques liés au travail, a fait le compte des mis en cause qui l’ont saisie de 1996 à 2001, et de ceux qui ont été innocentés : le nombre de mis en cause annuel est autour de cent, la proportion d’innocentés est de 73%. Mais la proportion d’innocents est encore plus élevée, puisque certains se suicident avant procès et d’autres sont injustement condamnés.
- les professionnels de la Justice, comme l’avocate Florence Rault qui a titré un article « Des Outreau par dizaines » (Libération, 24 avril 2004) et les militants d’associations de pères s’accordent pour dire qu’ils sont confrontés chaque année à des dizaines d’affaires de ce type.
Si l’on extrapole à l’ensemble des pays développés, et pour les quinze dernières années, on arrive à un nombre de victimes qui se compte par milliers.
b) c’est un phénomène sexué, qui touche quasi-exclusivement des hommes. Peu de femmes en ont été victimes : quatre sur les treize mis en cause innocents d’Outreau, quelques enseignantes accusées par des élèves filles ;
c) c’est un phénomène sexiste, qui s’inscrit dans un contexte idéologique très prégnant, celui de la diabolisation des hommes, de la misandrie (voir 7) ;
d) c’est un phénomène irrationnel, d’hystérie collective : une simple plainte ou un signalement suffisent à déclencher interpellation, inculpation, emprisonnement préventif ; souvent, l’instruction est faite exclusivement à charge ; des condamnations sont prononcées sans aveux ni preuves, le primat étant donné à l’émotion ; par effet mimétique, d’autres plaintes suivent, contre le même homme ou contre d’autres, et ainsi de suite.
3. Les fausses accusations obéissent à des motivations diverses, qui ne sont pas forcément identifiables
a) dans les situations de divorce, les accusations d’abus sur les enfants du couple sont portées contre le père par la mère, ou par un(des) enfant(s) manipulé(s) par la mère. Le but est d’obtenir de la Justice la résidence principale (ou exclusive) des enfants.
b) dans l’Éducation nationale, les accusations sont portées par des élève(s) ou d’anciens élèves contre un enseignant :
pour lui nuire, par exemple pour se venger d’une sanction ;
par une projection d’ordre affectif sur celui-ci (c’est la situation décrite en 1967 par André Cayatte dans son film Les risques du métier, où Jacques Brel joue le rôle d’un instituteur)
pour attirer l’attention, bénéficier du statut psychique/médiatique de victime ;
c) dans le contexte familial, les accusations sont portées par un(e) enfant contre son père :
pour se venger de mauvais traitements ;
pour attirer l’attention, bénéficier du statut psychique/médiatique de victime.
C’est cette dernière motivation qui a amené Virginie Madeira, âgée de quatorze ans, à accuser faussement son père de viol. Elle y a vu la possibilité de compenser l’effacement dû à son caractère timide et réservé : « Je suivais une série à la télévision, Sunset beach. C’était tous les jours sur TF1, je la regardais en sortant du collège. Une fille avait accusé un homme de la violer, mais au moment du procès il s’est avéré que c’était son père. Ensuite, tout le monde est venu vers cette fille, les gens l’entouraient, elle était écoutée. » (J’ai menti, p. 35)
d) dans le cadre de liaisons entre adultes, les accusations sont portées par d’ex-conjointes ou ex-compagnes contre leur ex-mari ou ex-compagnon (même si la liaison a été brève) :
- pour se venger de la rupture ;
- pour obtenir de l’argent (cf Marie-José Vo, qui a faussement accusé de viol Johnny Halliday en 2001) ;
- pour attirer l’attention, bénéficier du statut psychique/médiatique de victime (cf l’ex-compagne de John Goetelen, qui l’a faussement accusé de viol en 2001).
e) dans certains cas, les accusations découlent de pathologies spécifiques :
- mythomanie ;
- faux souvenirs induits (suggérés par de pseudo-thérapeutes, qui amènent des personnes fragiles à croire qu’ils sont la marque d’abus anciens, retrouvés par leur mémoire)
f) dans d’autres cas, l’accusatrice a bel et bien été abusée, mais par une personne autre que le mis en cause. Elle ne veut ou ne peut pas accuser cet autre, car il est trop proche (ce peut être le père, le frère, un oncle, etc). Mais elle a besoin d’une réparation. Consciemment ou non, elle transfère l’accusation sur un homme qui n’y est pour rien (Emilie R., qui a démenti ses accusations contre Loïc Secher, semble rentrer dans cette catégorie).
Les processus e) et f) peuvent très bien se combiner avec les autres motivations décrites. Plus ils sont inconscients, et plus les accusatrices développent une force de conviction susceptible de faire croire à la réalité de ce qu’elles dénoncent.
La plupart de ces motivations sont difficilement identifiables, voire concevables par des non-spécialistes, ce qui explique que les accusatrices parviennent à tromper des policiers, des médecins, des magistrats, des jurys populaires… et même des psychologues au statut d’« experts ».
4. Les fausses accusations bénéficient d’un apriori favorable de tous les acteurs sociaux
Confronté aux accusations, les acteurs sociaux ne réagissent pas de manière rationnelle, mais en fonction de croyances, de bénéfices secondaires, d’a priori personnels ou idéologiques.
Des exemples de croyances largement répandues : « Il n’y a pas de fumée sans feu » ; « L’enfant dit toujours la vérité » ; « Une accusatrice n’a pas de raison de mentir »...
De même que beaucoup d’accusatrices cherchent dans le statut de victime une valorisation personnelle ou sociale, beaucoup d’acteurs sociaux recherchent, souvent inconsciemment, une valorisation symétrique dans un autre statut : celui de sauveur d’une victime. Dans son livre, Virginie Madeira raconte remarquablement comment les pressions de tous l’amènent à confirmer son accusation, et l’empêchent de la démentir à temps. C’est le cas successivement du personnel du collège (enseignantes, CPE, principale), du personnel policier, du pédiatre et du gynécologue qui l’examinent ( et qui confirment le viol du fait d’« incisures » dont on saura plus tard qu’elle est née avec !), du psychologue expert (qui confirme la présomption de viol). C’est aussi le cas, après qu’elle ait décidé de revenir sur son accusation, à dix-sept ans, de deux avocates et d’un psychiatre qui s’efforcent de l’en dissuader. L’avocat de son père, enfin, agit dans le même sens, puisqu’il amène celui-ci à faire de faux aveux, dans le but d’atténuer sa peine.
Certain(e)s avocat(e)s spécialisé(e)s dans les affaires de divorce incitent d’ailleurs leurs clientes à lancer de fausses accusations contre leur conjoint, au titre qu’elles leur fourniront un avantage décisif dans la procédure.
Il est arrivé aussi qu’un très haut représentant de l’État, en l’occurrence une ministre déléguée chargée de l’enseignement scolaire (gouvernement Lionel Jospin), Ségolène Royal, introduise des procédures facilitantes. En août 1997, celle-ci a publié une circulaire, toujours en vigueur quoique atténuée par celle de Jack Lang en 2001, qui stipule que : « dès qu’un élève a confié à un membre de l’Éducation nationale des faits dont il affirme avoir été victime, il appartient à ce fonctionnaire d’aviser immédiatement et directement le procureur de la République », faute de quoi il pourrait être poursuivi pour complicité. Cette consigne, interdisant aux fonctionnaires toute prudence par rapport aux accusations douteuses, a provoqué une prolifération de signalements injustifiés.
5. La responsabilité de l’idéologie misandre est ancienne et écrasante
« Les pères n’aiment pas leurs enfants » : tel est l’un des points de vue misandres sur la relation père-enfant, bien résumé par Françoise d’Eaubonne dès 1974 :
« les femmes aiment les enfants, en grande majorité, incomparablement plus que les hommes. Fréquemment, à la limite, l’enfant devient un complice de la femme contre l’homme, dans la communauté de la même oppression. L’homme veut se prolonger, mais il n’aime pas d’instinct ce qui le prolonge : au contraire il s’en méfie et le jalouse. » (Le féminisme ou la mort, Pierre Horay, pp. 96-97)
Une autre thèse misandre, concernant la sexualité masculine, soutient que le viol lui est consubstantiel. On se souvient du tristement célèbre slogan des années 80 : « Cet homme est un violeur. Cet homme est un homme » ; et un peu moins d’un autre, plus empreint d’humour mais tout aussi lapidaire : «Viol de nuit, terre des hommes ».
Aujourd’hui, les idéologues misandres tiennent toujours le même discours, telle Virginie Despentes : « Le viol, c’est le propre de l’homme, non pas la guerre, la chasse, le désir cru, la violence ou la barbarie, mais bien le viol, que les femmes – jusqu’à présent – ne se sont jamais approprié. La mystique masculine doit être construite comme étant par nature dangereuse, criminelle, incontrôlable.» (King Kong théorie, Grasset, 2006, p. 54)
Si, par nature, les pères ne respectent pas leurs enfants, et si, par nature, les hommes sont irrésistiblement poussés au viol, alors toutes les accusations d’abus portées contre eux deviennent vraisemblables, et les précautions habituellement prises avant de mettre en cause ou condamner quelqu’un deviennent superflues.
Le fait que le développement des fausses accusations culmine à une époque où culmine aussi l’idéologie misandre n’est pas un hasard. Certes, celles-ci résultent d’un faisceau de causes diverses. Mais la misandrie est la cause de leur multiplication. C’est sa prégnance qui fait croître le nombre de fausses accusatrices, et le nombre de personnes disposées à les croire au point de cautionner leur sinistre entreprise.
6. Quelle que soit l’issue des procédures, les mis en cause en sortent toujours détruits
Il est faux de dire : les fausses accusations sont sans conséquence, puisque les mis en cause, s’ils sont innocents, en sortiront forcément indemnes. En effet, outre que la Justice condamne aussi des innocents, les innocentés subissent de toute façon toute une série d’épreuves d’ordre psychique, familial, professionnel, social, etc. Même si elle n’est pas validée par la Justice, la fausse accusation parvient toujours à nuire, voire détruire.
- pour tous, l’accusation est un choc moral très violent, qui provoque des traumatismes : stupeur, colère impuissante, dégoût de vivre. Certains, pour qui le seul fait d’être accusés est insupportable, se suicident aussitôt (comme Bernard Hanse, prof d’EPS, ou Paul Jacquin, instituteur alsacien). Les autres doivent supporter les regards suspicieux, et assumer la souffrance de leurs proches, tout aussi choqués. Et aussi l’attente angoissante du dénouement hypothétique de procédures interminables (sept ans pour John Goetelen, une durée moyenne).
- les enseignants mis en cause sont, dès le dépôt de plainte ou le signalement, suspendus par leur administration, parfois avec retenue de salaire, jusqu’à leur acquittement. Entre temps, la rumeur les discrédite dans leur établissement, leur ville voire toute leur région, ce qui les contraint à déménager et reprendre leur vie sociale à zéro.
- les pères mis en cause sont par précaution interdits de contact avec leurs enfants par la Justice, jusqu’à la fin de la procédure, laquelle dure au moins deux ans. Lorsqu’il sont innocentés, leur relation avec ceux-ci est fortement perturbée. Si les enfants sont en bas âge, ils ont très peu de souvenirs de leur père. Si l’ex-conjointe a poursuivi son travail d’aliénation parentale, ils peuvent croire qu’il les a abandonnés, voire être complètement conditionnés à son rejet.
- ceux qui sont injustement condamnés perdent plusieurs années de leur vie (Loïc Secher a effectué pour rien six années de prison), et ne sont indemnisés que de façon dérisoire.
7. A l’inverse, les accusatrices en sortent (presque) toujours indemnes
Virginie Madeira et Émilie R. ont exprimé des remords sincères, mais elles sont des cas exceptionnels.
Les fausses accusatrices n’ont à craindre ni pour leur salaire, ni pour leur emploi, et de par leur identité entretenue de victimes, sont insensibles à toute réprobation morale.
Surtout, même si leurs accusations sont démenties par les procédures, elles ne risquent ensuite aucun retour de bâton : sous des prétextes divers (par exemple celui de leur « bonne foi »), la Justice refuse de les condamner, voire même de les poursuivre pour « dénonciation calomnieuse ». Poursuivie par Johnny Halliday en 2007, Marie-José Vo a obtenu un non-lieu, alors qu’elle a été, dans la même affaire, condamnée pour usage de faux certificats médicaux. La plainte de John Goetelen contre son accusatrice a été à deux reprises classée sans suite. Les rares condamnations obtenues l’ont été au civil.
La Justice offre ainsi aux accusations la garantie de l’impunité, soit un encouragement implicite, qui favorise leur multiplication.
8. Le GES propose
Extraits de la Plate-forme de revendications 2012 (partie I. Vie publique) :
11. Redéfinition de l’action de la Police et de la Justice pour une véritable prévention et sanction des délits suivants (qui actuellement bénéficient peu ou prou de l’impunité) :
a. les non-représentations d’enfants (voir 27b)
b. les fausses accusations de violences physiques ou sexuelles (voir aussi 27b)
c. les paternités imposées (voir II A et B).
12. Concernant spécifiquement les fausses accusations de violences sexuelles :
a. dans les procédures, extension de l’expertise psychiatrique à la personne accusatrice, et à sa famille s’il s’agit d’un(e) mineur(e) ;
b. rappel fait aux personnels policier et judiciaire de la nécessité d’une vérification approfondie de la version proposée par la personne accusatrice ;
c. simplification des procédures permettant de faire aboutir une plainte pour dénonciation calomnieuse ;
d. dans l’Éducation Nationale, remise en cause de la circulaire Ségolène Royal du 26 août 1997, qui favorise ce genre de délit ;
e. obligation faite aux organismes chargés de réaliser les enquêtes statistiques sur les violences de recenser les fausses accusations (ONDRP ; DEPP pour l’enquête SIVIS dans l’EN).
9. Sources
Florence Aubenas. La méprise : l’affaire d’Outreau. Seuil, 2005
Guy Bechtel. La sorcière et l’Occident. Plon, 1997
Paul Bensoussan, Florence Rault. La dictature de l’émotion. Belfond, 2002
Georges Dupuy. Coupable d’être un homme. VLB, 2000 (Québec)
Matthieu Jego. L’instituteur de la discorde (documentaire). M6, 2010
John Goetelen. La femme est-elle vraiment l’avenir de l’homme ? Marco Pietteur, 2006
Virginie Madeira, Brigitte Vital-Durand. J’ai menti. Stock, 2006
Marie-Monique Robin. L’école du soupçon. Les dérives de la lutte contre la pédophilie. La Découverte, 2006
Marie-Monique Robin, L’école du soupçon (documentaire). France 5, 2007
10. Liens