Source : Le Parisien
Des éléments nouveaux remettent en cause les soupçons d'agression sur une élève de quatre ans en Côte-d'Or. Les enquêteurs s'intéressent de près à un membre de l'environnement familial de la petite fille.
Éric P. a toujours clamé son innocence. Mis en examen depuis novembre 2016 pour le viol d'une de ses élèves de quatre ans, cet instituteur de Genlis (Côte-d'Or) n'avait jusqu'ici jamais été cru. Les derniers développements de l'enquête sont tels que la justice semble désormais encline à donner du crédit aux dénégations de ce père de famille de 43 ans.
Devant la cour d'appel, le parquet général de Dijon se prononcera ce jeudi en faveur de son placement sous le statut intermédiaire de témoin assisté. C'est-à-dire un affaiblissement considérable des charges qui pèsent contre lui. La découverte du sperme d'un membre de la famille de la fillette sur la culotte de celle-ci a donné une tournure totalement différente à l'affaire.
L'agression remonte au 14 novembre 2016. Lorsqu'elle est entendue, la petite fille, scolarisée en maternelle, indique que «le maître» lui aurait «gratté son kiki». Son instituteur, un professeur des écoles remplaçant sans aucun antécédent judiciaire et très bien noté, est aussitôt placé en garde à vue. Il nie les faits, mais il est mis en examen pour viol et atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité. Il est placé en détention provisoire et suspendu de l'Education nationale.
Plusieurs éléments plaident en sa faveur
D'emblée, certains éléments troublants apparaissent. Le jour des faits, Eric P. n'est exceptionnellement pas seul à assurer la classe. Or sa collègue ne masque pas sa perplexité : elle certifie aux gendarmes que ce dernier ne s'est retrouvé seul avec les enfants que pendant cinq minutes, et encore entre la salle de classe et la cour de récréation. «Je ne vois pas de créneau propice à ce genre d'acte», confie également la directrice de l'école.
Mais c'est fin mars, quelques jours après la remise en liberté sous contrôle judiciaire de l'instituteur, que l'enquête prend un virage à 180°. L'expert qui a examiné la culotte de la fillette a mis au jour une tache de sperme sur le devant du sous-vêtement, dont l'ADN correspond à un proche de l'enfant. «C'est une bombe, assène Me Claude Llorente, l'avocat parisien d'Eric P. L'expert a également décelé une trace de sang au même endroit. Le saignement est contemporain au viol. On a la preuve scientifique de l'innocence de mon client.»
La piste du proche de l'enfant de nouveau exploitée
Judiciairement, cette découverte pour le moins déroutante ne va pourtant rien changer à la situation d'Eric P. L'homme à qui correspond le sperme est, lui, entendu. Il justifie la présence de son liquide séminal par une contamination après un mélange de vêtements. Une hypothèse de «transfert secondaire» possible, mais «qui dépend de plusieurs paramètres», nuance l'expert.
Le juge d'instruction a ordonné de nouvelles expertises en septembre pour savoir si l'agression est compatible avec une pénétration pénienne.
De son côté, l'association Innocence en danger, partie civile au dossier, a également fait part de ses doutes au magistrat. «Même si aucune hypothèse ne doit être exclue, il y en a une — celle du proche de l'enfant — qui n'est pas suffisamment exploitée, estime Me Marie Grimaud. Nous sommes également favorables à la désignation d'un administrateur ad hoc afin de protéger la fillette.»
Avec les réquisitions du parquet général favorables à la levée de sa mise en examen, c'est la première fois qu'Eric P. «entrevoit le soleil derrière les nuages». «On m'accuse d'une chose horrible, mais je tiens grâce au soutien de ma femme, de mes enfants, de mes collègues et de tous mes amis qui n'ont jamais douté de mon innocence, confie l'instituteur. Mais je ne serai soulagé que quand je serai totalement blanchi et que la petite sera en sécurité.» Le proche de la victime pourrait être à nouveau entendu. Sous le régime de la garde à vue cette fois.
T.B. Le Parisien